Un document complémentaire a été déposé devant le Conseil des droits de l’homme.
par Massimo Introvigne
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Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies est l’organe qui surveille la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) par les États membres. Du 10 octobre au 4 novembre 2022, il tient sa 136e session à Genève. Le Japon figure parmi les pays dont le respect du pacte international est examiné lors de cette session.
Parmi les dossiers soumis par les ONG dotées du statut consultatif auprès de l’ECOSOC (Conseil économique et social des Nations unies) qui seront examinés lors de la session, un document a été déposé par CAP-LC (Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience). Il traite des violations du PIDCP perpétrées au Japon contre l’Église de l’Unification (aujourd’hui connue sous le nom de Fédération des familles pour la paix mondiale et l’unification) après l’assassinat de l’ancien Premier ministre Shinzo Abe – un thème déjà longuement abordé dans une série d’articles de Bitter Winter.
Abe a été tué par un homme qui n’a jamais été membre de l’Église de l’Unification. Sa mère a fait faillite il y a vingt ans, et il a mis cela sur le compte des dons excessifs qu’elle faisait à cette Église. Il a décidé de punir Abe, car l’ancien Premier ministre avait assisté par vidéo, puis envoyé un message, à deux événements d’une organisation liée à l’Église de l’Unification. L’assassin avait également prévu de tuer la fondatrice de l’Église de l’Unification, laquelle était donc, à l’instar d’Abe, clairement la victime dans cette affaire.
Or, il existe une opposition organisée à l’Église de l’Unification au Japon, qui a réussi à persuader l’opinion publique que le groupe religieux était en partie responsable de l’homicide. Selon leur logique tordue, si sa mère n’avait pas fait des dons à l’Église de l’Unification puis fait faillite (en 2002), l’assassin n’aurait pas tué Abe (en 2022).
Depuis le dépôt de la première soumission de CAP-LC au CDH, les violations des droits humains de l’Église de l’Unification/Fédération des familles se sont poursuivies au Japon. CAP-LC a maintenant déposé un document complémentaire, en notant que « la situation s’aggrave ».
La première partie du document est consacrée au prétendu comité d’experts de l’Agence de protection des consommateurs, qui a commencé ses travaux après avoir été convoqué par le ministre de la Protection des consommateurs, M. Taro Kono. L’un des huit membres du comité est M. Masai Kito, un membre important du Réseau national des avocats contre les ventes spirituelles opposé à l’Église de l’Unification. Il est également, note CAP-LC, « l’un des avocats qui, dans le passé, ont représenté des ‘déprogrammeurs’ engagés dans l’activité illégale d’enlèvement et de détention de membres adultes de l’Église de l’Unification dans le but de les ‘dé-convertir’ ». D’autre part, le comité ne compte aucun spécialiste des religions parmi ses membres.


CAP-LC soutient que « les opposants utilisent le comité comme un instrument servant à promouvoir une ‘solution finale’ au problème de l’Église de l’Unification, en nommant si nécessaire un ministre d’État qui serait chargé d’une répression définitive. » Le document décrit trois stratégies utilisées pour atteindre cet objectif.
La première consiste à demander un ordre de dissolution de l’Église de l’Unification/Fédération des familles, même si « ni l’Église de l’Unification/Fédération des familles en tant qu’organisation, ni aucun de ses dirigeants nationaux n’a été condamné pour un crime quelconque ».
Deuxièmement, le comité prévoit de proposer des amendements à la loi pour restreindre « les dons abusifs aux organisations religieuses ». Shiori Kanno, membre du comité, a expliqué que la modification des lois sur les dons est nécessaire pour distinguer les « organisations religieuses décentes » de celles qui ne le sont pas. La déclaration explique qu’« après plusieurs décennies de plaidoyer pour la liberté de religion ou de conviction, CAP-LC a appris qu’un langage vague ouvre immanquablement la porte à la discrimination. Selon quelles normes les autorités japonaises décideraient-elles quelles religions sont ‘décentes’ ou non ? Que signifie exactement qu’une religion est ‘décente’ ? Les autorités administratives sont-elles compétentes pour porter un jugement sur les religions ? »
Selon les informations, le comité prévoit d’interdire « d’exiger des dons en jouant sur les peurs spirituelles des adeptes, ou lorsqu’un individu est incapable de prendre une décision rationnelle ». CAP-LC commente que « la notion de ‘décision rationnelle’ est vague. Si le donateur est mentalement incapable, les dons sont déjà frappés d’annulation en vertu de la loi japonaise. Si les donateurs sont mentalement compétents, qualifier leur décision d’’irrationnelle’ renvoie, soit à la théorie discréditée et pseudo-scientifique du lavage de cerveau, soit à une manière de contourner la question en impliquant que tous les dons à une religion ‘non décente’ sont par définition irrationnels ».
Quant aux « peurs spirituelles des adeptes », CAP-LC note que « la peur de perdre le salut éternel est un élément constitutif des religions monothéistes » et se retrouve également dans d’autres religions. « Ce n’est certainement pas une caractéristique unique de l’Église de l’Unification, et légiférer contre ceux qui prêchent la validité de la peur spirituelle reviendrait à légiférer contre la plupart des religions. »
« Une question qui n’est jamais posée, ajoute CAP-LC, est de savoir à quelles fins les dons sont utilisés. La question n’est pas dénuée de pertinence. Les médias et les opposants laissent entendre que les dons à l’Église de l’Unification ne font qu’enrichir ses dirigeants, un vieux stéréotype des controverses antireligieuses. En fait, l’argent collecté au Japon a été largement utilisé à diverses fins philanthropiques, notamment pour la construction, l’aménagement et l’entretien d’un hôpital à Tokyo, l’aide aux victimes de tsunamis ou de tremblements de terre au Japon, des centres médicaux en Afrique, et bien d’autres entreprises caritatives. »
La troisième stratégie utilisée contre l’Église de l’Unification consiste à « prétendre que les parents qui élèvent des enfants de la deuxième génération dans la foi de l’Église sont coupables de ‘maltraitance d’enfants’ ». « Comme preuve, rapporte CAP-LC, on a mentionné le cas d’un membre de la deuxième génération qui a attribué une dépression à l’engagement de ses parents dans l’Église de l’Unification, ainsi que des cas où les parents étaient apparemment si occupés par les activités de l’Église qu’ils négligeaient leurs enfants. D’autres parents de l’Église ont été accusés de s’ingérer dans la vie sentimentale de leurs enfants. »
CAP-LC objecte que « la ‘maltraitance d’enfant’ est une catégorie juridique très spécifique qui fait référence à la violence physique ou sexuelle. Évidemment, le fait d’être trop occupé par son travail ou d’autres activités, ou d’essayer de contrôler les relations amoureuses de ses enfants, sont des plaintes fréquentes que les enfants formulent à l’encontre de leurs parents – mais, même lorsqu’elles sont fondées, elles ne constituent pas un ‘maltraitance d’enfant’. Cela impliquerait, dans le cas de l’Église de l’Unification, que la socialisation des enfants dans une religion ‘non décente’ équivaudrait automatiquement à une ‘maltraitance d’enfant’. Il est clair qu’on peut utiliser cet argument contre toute minorité religieuse impopulaire. »
En fait, CAP-LC note que « d’autres religions en prennent conscience et s’inquiètent du fait que le Japon menace de ne pas respecter ses obligations en matière de liberté religieuse au titre du PIDCP. Fait significatif, notre première soumission au Comité des droits de l’homme concernant la discrimination contre l’Eglise de l’Unification au Japon a été présentée à ses lecteurs par AsiaNews, l’agence de presse officielle de l’Institut Pontifical des Missions Etrangères. »


La deuxième partie de la nouvelle soumission fait référence à la hotline lancée par le ministère de la Protection des consommateurs, où les citoyens peuvent se plaindre des prétendues « ventes spirituelles » et d’autres pratiques présumées répréhensibles de l’Église de l’Unification. La hotline aurait dû fonctionner jusqu’au 30 septembre, mais son fonctionnement a été prolongé indéfiniment.
CAP-LC cite des données du ministère de la Protection des consommateurs et du ministère de la Justice qui prouvent la nature discriminatoire de cette hotline.
« La première série de données, explique le document, concerne les plaintes relatives aux soi-disant ‘ventes spirituelles’ reçues par le ministère entre 2012 et 2021, aussi bien les ventes en général que celles spécifiquement liées à l’Église de l’Unification/Fédération des familles. » Ces données montrent que « seul un petit pourcentage des plaintes concernant les ‘ventes spirituelles’ reçues par le ministère concernait l’Église de l’Unification. En 2021, ce pourcentage était de 1,87 %. […] En 2021, plus de 98% des plaintes concernaient des groupes autres que l’Église de l’Unification/Fédération des familles. » Les données confirment également que « les mesures prises par l’Église de l’Unification pour s’assurer que ses membres comprennent les lois existantes et les respectent, au lieu d’être simplement cosmétiques, comme le soutiennent les opposants, ont été remarquablement efficaces. […] Les plaintes concernant l’Église de l’Unification ont continuellement diminué, passant de 229 en 2012 à moins de 100 depuis 2015 et moins de 30 en 2021. »
Comme on pouvait s’y attendre, la hotline a reçu plus de plaintes en septembre 2022, après l’assassinat d’Abe et toutes les campagnes médiatiques contre l’Église de l’Unification. Sur les 1952 plaintes reçues du 5 au 22 septembre, 1317 concernaient l’Église de l’Unification. Selon le gouvernement, 70% concernaient des « problèmes d’argent », ce qui devrait inclure les « ventes spirituelles ».
CAP-LC commente que « si des étudiants de premier cycle menaient une enquête en adoptant la méthodologie utilisée pour la hotline, ils seraient à juste titre ridiculisés par leurs professeurs. Non seulement la hotline crée par définition un échantillon auto-sélectionné, mais elle est facilement manipulable par les ennemis de l’Église de l’Unification. De plus, il n’existe aucun moyen de vérifier si les personnes qui appellent ont bien l’identité qu’elles prétendent, ou si leurs plaintes sont vraies, exagérées ou simplement inventées. » Néanmoins, le gouvernement rapporte « que 7,5 % des personnes qui ont appelé se sont déclarées membres du mouvement religieux qu’elles critiquent, 24 % ont dit être d’anciens membres, et le reste, c’est-à-dire la majorité des appelants, se sont identifiés comme des parents ou des amis, ou simplement comme des citoyens inquiets. En outre, 65% des plaintes mentionnaient des incidents survenus il y a plus de 10 ans ou ne précisaient pas de date. »
CAP-LC conclut que « les appels sur la hotline ne prouvent rien, si ce n’est qu’une chasse aux sorcières a lieu au Japon contre l’Église de l’Unification, qui n’a aucun moyen de se défendre au cours des procédures du comité. Les opposants passent sous silence le fait que, selon les propres données du ministère, le nombre de plaintes concernant les ‘ventes spirituelles’ concerne en grande majorité des groupes autres que l’Église de l’Unification, et que cette dernière a pris des mesures efficaces ayant conduit à une diminution substantielle des cas au fil des ans. »


Le document complémentaire ajoute également des nouveaux cas de violence et de discrimination concernant des membres de l’Église de l’Unification/ Fédération des familles, y compris des membres de la Fédération internationale des femmes pour la paix mondiale (WFWP), une organisation fondée par la dirigeante de l’Église de l’Unification/Fédération des familles, Mme Hak Ja Han Moon, qui bénéficie du statut consultatif général auprès de l’ECOSOC de l’ONU. « Ces incidents, commente CAP-LC, sont particulièrement choquants, car ils ajoutent un élément de genre et discriminent un groupe dont l’objectif est de promouvoir les femmes au niveau international, et dont les activités ont été reconnues à plusieurs reprises par les Nations unies. »
« Les témoins que nous avons interrogés, rapporte CAP-LC, ont le sentiment profond que le gouvernement ne protège pas efficacement leurs droits. L’un des calomniateurs sur les médias sociaux est précisément l’avocat, Masai Kito, qui est membre du comité du ministère de la Protection des consommateurs. Selon les femmes maltraitées de la Fédération, l’attitude du gouvernement suggère qu’il montre plus de sympathie envers ceux qui calomnient et discriminent qu’envers les victimes de ces abus. »
CAP-LC conclut que « malheureusement, la situation au Japon s’aggrave de jour en jour. L’hystérie autour de l’Église de l’Unification/Fédération des familles brise les barrières protectrices érigés par le PIDCP pour protéger les droits humains et la liberté de religion ou de conviction au Japon. ».
En tant que signataire du PIDCP, le temps est venu pour le Japon de faire l’objet d’un examen approfondi par la communauté internationale.