BITTER WINTER

L’assassinat d’Abe. L’Église de l’Unification est victime de discours de haine et de discrimination

by | Sep 5, 2022 | Documents and Translations, French

Après l’assassinat de l’ancien Premier ministre, les membres de l’Église de l’Unification reçoivent des menaces de mort et sont victimes d’intimidation au travail et à l’école.

par Massimo Introvigne

Article 4 sur 7. Lire l’article 1, l’article 2 et l’article 3.

Read the original article in English.

Unification Church/Family Federation protests in Korea against media slander and discrimination in Japan.
Manifestations de l’Église de l’Unification/Fédération des familles en Corée contre les calomnies des médias et les discriminations au Japon.

Si vous avez déjà reçu une menace de mort (c’est mon cas), vous savez que ce n’est pas drôle. Au début, vous pensez qu’il s’agit d’une mauvaise blague, mais une petite voix persistante vous dit que ce monde est plein de fous, et que certains parmi eux peuvent être dangereux. Au moindre bruit suspect, la nuit, votre esprit vous suggère que c’est peut-être ce fou qui vient s’en prendre à vous.

C’est ce qu’ont vécu certains membres de l’Église de l’Unification/Fédération des familles au Japon après l’assassinat de l’ancien Premier ministre Shinzo Abe. Son assassin affirme que sa mère avait été ruinée vingt ans auparavant en raison des dons excessifs qu’elle avait faits à l’Église de l’Unification, et qu’il avait l’intention de punir Abe pour avoir d’abord participé par vidéo, puis envoyé un message, à deux évènements d’une organisation liée à cette Église.

Au lieu de blâmer l’assassin, ou bien les campagnes très médiatisées contre l’Église de l’Unification qui ont pu influencer son esprit fragile, certains avocats et médias japonais ont fait le procès des victimes. Ils ont suggéré qu’il fallait publiquement dénoncer et sanctionner les « sectes » comme l’Église de l’Unification.

En 2011, j’occupais le poste de Représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), à laquelle participent aussi les États-Unis et le Canada, pour la lutte contre le racisme, la xénophobie, et l’intolérance et la discrimination religieuses. Les crimes de haine et les discours de haine constituaient une part importante de mon mandat.

2011, visite officielle en Ukraine des représentants de l’OSCE pour la lutte contre l’islamophobie : Adil Akhmetov (à gauche) ; contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance religieuse : Massimo Introvigne (au centre) ; et contre l’antisémitisme : Andrew Baker (à droite).

Tous ceux qui écoutent des discours de haine contre les minorités religieuses ne commettent pas des crimes de haine, mais certains le font. Au Japon, la haine diffusée contre l’Église de l’Unification a conduit à des menaces de mort contre plusieurs de ses membres.

Les médias japonais qui rapportaient ces incidents laissaient aux lecteurs la possibilité de publier des commentaires. Certains y ajoutaient des autres menaces de mort. J’espère que la police japonaise prête attention à ces messages. On sait à présent que l’assassin d’Abe a commencé à publier sa haine envers l’Église de l’Unification en diffusant des insultes et des menaces sur les médias sociaux. Et on sait comment cela s’est terminé.

Un discours de haine est par nature envahissant. Une fois diffusé dans les médias ou sur Internet, ses conséquences sont incontrôlables. On rapporte que des membres de l’Église de l’Unification au Japon ont été insultés dans la rue, ridiculisés au travail, maltraités à l’école, ou confrontés à une demande de divorce de leur conjoint. On ne peut qu’espérer et prier que la violence verbale ne dégénère pas en violence physique, voire en meurtre. Les discours de haine et leurs conséquences fatales ne relèvent pas seulement du passé. Chaque mois, voire chaque semaine, des Ahmadis sont tués au Pakistan parce qu’ils sont membres d’un mouvement religieux visé par des discours de haine dans les médias, ou dans les sermons de prédicateurs de la religion majoritaire.

Les discours de haine favorisent également la discrimination, notamment par des lois visant les membres d’un groupe minoritaire et faisant d’eux des citoyens de seconde classe. C’est déjà le cas de l’Église de l’Unification au Japon. Alors que les dons faits aux religions sont exonérés d’impôts, comme dans tous les pays démocratiques du monde, on avance l’argument que les dons à l’Église de l’Unification ne sont pas versés à une « vraie » religion, mais à une « secte » frauduleuse, et qu’il faudrait les considérer comme des paiements résultant de ventes, donc les taxer comme tels.

Une autre photo des manifestations de l’Église de l’Unification en Corée.

Les Japonais n’inventent rien. La France a une étrange politique officielle contre les « sectes », laquelle est aujourd’hui saluée comme un modèle par certains au Japon. Les autorités françaises ont soutenu dans le passé que les dons faits aux Témoins de Jéhovah, ainsi qu’à d’autres groupes qui étaient inclus dans une liste de « sectes », n’étaient pas des dons mais des paiements pour des biens ou des services, et devaient donc être soumis à l’impôt. La Cour européenne des droits de l’homme n’a pas été convaincue. Elle a jugé que le fait de requalifier des dons comme des paiements pour ventes n’était qu’une façon de discriminer des groupes religieux que les autorités françaises n’aimaient pas et qualifiaient de « sectes ». La France a dû restituer les impôts que les Témoins de Jéhovah et deux autres mouvements religieux avaient déjà versés, en y ajoutant les frais de justice et les dommages et intérêts.

Le Japon n’adhère pas à la Convention européenne des droits de l’homme, mais il a signé la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont l’article 18 contient des dispositions parallèles. Dans une interprétation officielle appelée Observation générale n° 22, publiée en 1993, les Nations unies ont déclaré que « l’article 18 n’est pas limité dans son application aux religions traditionnelles ». Les Nations unies mettent en garde contre « toute tendance à faire preuve de discrimination à l’encontre d’une religion ou d’une conviction quelconque pour quelque raison que ce soit, notamment parce qu’elle est nouvellement établie ou qu’elle représente des minorités religieuses susceptibles d’être en butte à l’hostilité́ d’une communauté́ religieuse dominante ».

Pour prévenir l’influence croissante de l’intolérance médiatique et de la discrimination administrative à l’encontre des membres de l’Église de l’Unification au Japon, il est nécessaire de constituer une large coalition. Il devrait être évident aux yeux de tous que le fait de donner aux autorités le pouvoir de décider quelles religions sont bonnes ou mauvaises, lesquelles sont des « sectes », et d’imposer sur cette base les dons faits à ces dernières, est une menace pour tous les groupes religieux. Des institutions d’États prétendument laïques se transforment alors en nouveaux pouvoirs inquisiteurs.

Certains médias japonais objectent que l’Église de l’Unification n’est pas une religion aux croyances « normales » et que les déclarations relatives à son fondateur, le révérend Moon, sont étranges. Il est donc temps que je fasse mon « coming out ». Je crois, moi aussi, en une religion qui prête à son fondateur des qualifications extraordinaires. Elle s’appelle le christianisme. En tant que chrétien, je crois qu’un juif exécuté il y a deux mille ans comme criminel est encore en vie aujourd’hui. Je crois aussi qu’il est né d’une mère vierge et qu’il a ressuscité des morts. C’est certainement plus étonnant que toute déclaration des membres de l’Église de l’Unification au sujet du révérend Moon.

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